session-20-seuil-04-séquence-16 Christ nouvel Adam

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« Dieu nous avait, en lui, aimés totalement. »

 

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sq-4-16, © Mess'AJE
 

Percevoir le dessein de Dieu pour le monde, pour l'humanité, pour moi.
Percevoir, en contemplant la profondeur de l'amour sauveur de Jésus, 
à quel point nous étions «perdus», ce que l'Église entend par «péché originel».
Réaliser à quelle liberté nous sommes rendus par le Christ et le sens que cela 
a dans la vie chrétienne.

C'est toute notre histoire qui, histoire d'alliance et de re-création d'amour devient re-création accomplie en Jésus, portée par l'Église, dans une passion et une résurrection d'amour, c'est aujourd'hui, c'est pour nous.

Médite, creuse, interroge (3 premiers seuils)

Le péché originel dans les Seuils de la foi : « C’est bien là que tout a commencé »

Dans les religions dites  ‘premières' ou ‘ traditionnelles’
 Dans la culture assyro-babylonienne. Le mythe babylonien de la création, L’Enuma Elish (planche VI) raconte que les dieux, pour créer l’homme, ont mêlé le sang d’un dieu déchu à de l’argile. C’est une façon d’expliquer pourquoi l’homme est enclin au mal : dès sa formation l’homme n’a pas été un être pur et innocent. On y affirme la croyance en la peccabilité naturelle de tous les hommes. 
En Égypte ancienne, le monde a été créé à partir d’un chaos originel "noun" où il y a l’esprit créateur, mais aussi des forces destructrices. Le monde né de ce chaos est donc imparfait : les forces destructrices œuvrent pour un retour au chaos. Le sage Amenemope donne ce conseil : Ne dis pas : Je n’ai pas de péché, rien n’est parfait auprès de Dieu. On a aussi trouvé près de Thèbes, au temps de la 18ème dynastie, des prières de gens simples : Ne me punis pas de mes nombreux péchés. Je suis un être qui ne se connaît pas lui-même. Je suis un homme dont le cœur est insensé.
Chez les Hittites : Le roi Murchilik II (I4ème s. av. JC) voit dans l’épidémie de peste qui ravage son pays, un châtiment infligé par les dieux : Vous, les dieux, mes maîtres, oui, il en est ainsi : on pèche effectivement. Mon père lui aussi, a donc péché et transgressé le commandement. Pour moi, je n’ai pas commis de péché. Mais c’est ainsi : le péché du père retombe sur son fils.
En Canaan : Comme dans tous les mythes, on raconte les luttes entre les dieux, exprimant les forces bénéfiques et maléfiques à l’œuvre dans le cosmos et qui dépassent l’homme.
Partout on note une solidarité dans le mal et une transmission de la culpabilité de génération en génération.
Michel Meslin : Quand les hommes parlent aux dieux, Bayard 2003
 
Le péché originel et le premier Seuil
La vision du monde d’Israël est imprégnée de ces conceptions ; en même temps, elle s’en démarque par son expérience de l’Alliance.
Gn 2-3 (mis par écrit sous Josias) reprend des éléments mythiques (Dieu potier, serpent, immortalité, cf. Gilgamesh...). Mais ce vieux récit de création exprime, en arrière fond, l’expérience des tribus sauvées gratuitement (Gn 2). Il parle aussi de rupture d’alliance (fascination des Baals, cultes de fécondité) et d’un pardon gratuit qui s’exprime par le fait que l’histoire continue en faveur de l’Alliance toujours renouvelée.
Pour l’Israël ancien en effet, le mal consiste à trop s’assimiler = être infidèle à YHWH. Dès les débuts de la foi d’Israël, le mal est donc lié à l’alliance - et non à une fatalité. Ce péché touche à la relation avec Dieu et avec les tribus sœurs ; il est « rupture d’alliance » et entraîne la mort. Israël se révèle n’être jamais à la hauteur de l’appel.
Le péché originel et le deuxième Seuil
Les prophètes dénoncent ce péché/mal d’assimilation, mais ils le voient aussi dans l’injustice sociale et le culte extérieur (Am 2,6s ; Is 1,11-18 ; Jr 6,13-14...), dans la cupidité des pasteurs (Jr 5,31 ; Ez 34), dans l’oubli du Seigneur et de ses œuvres de salut (Dt 8,7-11). La conscience du péché s’approfondit : il s’agit de l’infidélité de l’épouse envers l’Epoux (Os 2,4...), de l’ingratitude du fils envers son Père (Os 11,1-6). Parallèlement grandit la conscience de la sainteté de Dieu (Is 6) et de son amour (Dt 7,7 ; Jr 31,31 ; Os 11).
À travers l’expérience des exils avec leur cortège de malheurs, le peuple expérimente un « mal » qui le dépasse : l’infidélité à Dieu habite les mémoires, les générations sont solidaires dans ce péché (Dt 5,9), à moins qu’il ne soit individuel (Ez 18), mais tellement fondamental qu’il rende incapable d’une quelconque fidélité (Ez 16) ; il a des conséquences sur l’environnement (Jr 5,25 : ce sont vos iniquités qui ont mis un désordre dans la création).
La révélation du Dieu unique, Créateur de l’univers, sauveur-rédempteur (monothéisme d’Alliance), pose à frais nouveau la question de l’origine du mal. Il ne vient pas des autres dieux puisqu’ils n’existent pas !
Pour Cyrus, Dieu est « lumière/Mazda » le mal est absence de lumière, mais Dieu est un principe et non pas quelqu’un qui aime et crée par amour !
Pour le 2ème Isaïe : si Dieu est le Créateur de tout et qu'il est amour, (Is 43,1-3), d’où vient le mal ? Réponse : Je façonne la lumière et je crée les ténèbres, je crée le bien et je crée le mal (Is 45,7).
Au retour d’exil, le 3ème Isaïe confesse un véritable « divorce » entre Dieu et son peuple (Is 59) ; Israël ne peut se prévaloir de l’élection, il est aussi séparé de Dieu que le sont les païens (Is 63,11). Dieu s’est retiré devant le refus : Où est Celui qui mettait au milieu d’eux son Esprit Saint ? (Is 63,11). Nous sommes depuis longtemps un peuple sur qui tu ne règnes plus (Is 63,19a). L’homme - Israël - a pourtant sa responsabilité dans ce divorce, mais il est dépassé : Is 59,10- 11).

 

 

Seul Dieu peut franchir l’abîme creusé par le péché, donner son pardon aux cœurs contrits, une Alliance nouvelle aux assoiffés d’un salut qui ne peut être accueilli que par la foi (Is 61). La découverte de l'immensité de l'Amour divin donne un regard nouveau : Israël n’a pas la mesure du péché (Is 59,2-3)... A l’origine, on était créé dans cette transfiguration d’amour... Comment a-t-on pu la refuser, la casser, sinon sous influence ? Relié au Dieu d’Amour comme seul Dieu, le péché n’habite plus seulement les mémoires, il devient en Dieu « mémorial ». Les prêtres eux, confessent que l’Alliance est éternelle (Gn 9,16) : aucun mal, aucun péché ne peut séparer Israël de son Dieu et le Temple est là pour le pardon des transgressions de la Loi. Les païens, par contre, vivent dans cette séparation de Dieu. Pour Job, le mal en définitive reste une question sans que seule la parole de Dieu peut apaiser. Avec l’hellénisme (3eme siècle), des théologies divergentes se précisent dont on trouve des traces contradictoires dans le Siracide.

À l'époque de Jésus deux courants
« Courant officiel » : l’homme et le monde sont créés « mélangés » avec du bien et du mal. L’Alliance est éternelle : pas de divorce fondamental entre Dieu et son peuple, mais seulement des péchés - donc pas besoin de rédempteur personnel. La rédemption se trouve dans la pratique de la Torah, qui réoriente le penchant mauvais, et dans le Temple, qui donne le pardon des péchés le jour de Kippour où l’Alliance est reprise et la Présence redonnée dans le Saint des Saints.
« Courant apocalyptique » : Dieu a tout créé « bon ». Le mal vient du fait que l’homme et la création toute entière sont tombés dans les mains du Mauvais (Satan). L’Alliance entre Dieu et sa création est rompue ; cela engendre la prolifération du péché et la mort (être coupé de Dieu, source de vie, c’est mourir). Il ne s’agit pas « des péchés » mais d’une rupture fondamentale à l’origine de tous les péchés due à une révolte dans l’amour de l’ange de lumière, dans laquelle l’homme a été entraîné. Tout homme est créé pour vivre en communion avec Dieu, mais erre, aveugle, tel un orphelin (Is 59,2). Torah et Temple sont inaptes à sauver. La Torah est voilée, le Temple souillé ! Attente d’une rédemption du ciel : Ah ! si tu déchirais les cieux... (Is 63,19). Jean Baptiste se situe dans cette ligne. [Fondements : p. 497-498]
Le péché originel au troisième Seuil : « Et Jésus est venu et nous l’avons tué. »
Jésus, par tout son ministère, bien qu’il ne fasse aucune mention d’un péché originel, manifeste qu'il vient rendre la grâce originelle. Il se situe dans la mouvance apocalyptique de façon originale :
À son baptême, les cieux se déchirent, une voix céleste le désigne comme le Fils Bien-Aimé.
Il s’affronte aux démons et délivre l’homme du Mauvais (Lc 11,4) : Je voyais Satan tomber comme l’éclair (Lc 10,18).
En se situant en amont de la rupture, il révèle les choses cachées depuis la fondation du monde (Mt 13,35).
Il donne l’Alliance nouvelle (Lc 22,20) où l’homme est recréé à l’image de Dieu par le pardon du Père donné gratuitement et en surabondance (Mt 19,8 // Gn 1) pour un péché qui dépasse l’homme (Mt 18,24).
Mais Jésus se heurte au refus du courant officiel, refus qui montre la profondeur de l’aveuglement qui ira jusqu’à le faire crucifier.
Chez saint Jean (Jn 8,31-59)
Les Judéens ("judaïos" chefs de Jérusalem) versés dans les Écritures, refusent Jésus.
En se réclamant de la Torah pour le condamner, ils sont en réalité aveugles et ouvriers du Diable. Ils sont, sans le savoir, esclaves d’un péché qui remonte aux origines et dont le père n'est autre que Satan !
Le Fils lui, parce qu’il est en communion avec Dieu, peut rendre libre ceux qui croient en lui et demeurent dans sa Parole.
Ici, Jésus se révèle être la Torah "lumière" qui ajuste à Dieu ceux qui croient mais qui apparaît "ténèbres" pour ceux qui refusent de croire. Ceux-là qui se disent clairvoyants parce qu'ils ont la Torah de Moïse ne sont-ils pas eux-mêmes victimes d'un mal originel ? Ne sont-ils pas aveuglés par un enténèbrement qui remonte à avant le don de la Torah de Moïse, avant Abraham et même avant Noé ? La preuve, Caïn était déjà sous son emprise ! [FB/512].En refusant Jésus, le courant officiel atteste paradoxalement qu’lsraël a besoin d'un rédempteur qui prenne sur lui ce péché. Ce péché atteint aussi les disciples ; les noces sont différées : Je ne boirai plus du fruit de la vigne jusqu’au jour où je boirai le vin nouveau dans le Royaume de Dieu (Mc 14,25). Dès le début de son ministère, Jésus sait que si Satan a pu casser la création, il peut aussi casser la recréation. Son premier miracle chez Mc, est un exorcisme (Mc 1,23-28) et chaque miracle est ponctué d’une recommandation de discrétion pour ne pas réveiller la jalousie à l’origine du drame originel. Et Jésus s’offre lui-même pour manifester l’amour du Père plus grand : dans l’offrande de sa vie et de sa mort, il réalise en sa personne le pardon et l’ajustement au Père. C’est le sens de la montée de Jésus à Jérusalem et de la manière dont il vivra les événements de la passion.
Parle, vis (quatrième seuil)

Quatrième Seuil : le péché originel et la foi de l’Église : « Nous venons au monde comme des sans-famille»

Nous le voyons, si le terme "péché originel" n’apparaît pas dans la Bible, la question de l’origine du mal se pose dans des visions différentes de la création et du salut ; et Jésus s’inscrit clairement dans la vision apocalyptique.
Le sens de la mort de Jésus : révélation et guérison du péché originel : « Mais nous avons appris de ces quelques instants... »
Face au refus du Royaume, les disciples pouvaient attendre que Jésus remonte au ciel, comme Elie, sans connaître la mort, ou bien qu’il manifeste aux yeux de tous qu’il est bien l’Envoyé du Père (Mt 26,53). Or, il n’a pas choisi cette voie, mais le don total de lui-même au Père à travers l’humiliation de la crucifixion. Pierre d’achoppement pour les disciples ! En effet, si le Royaume était vraiment arrivé, si Jésus venait vraiment de Dieu, comment comprendre que Dieu l’ai laissé être condamné et crucifié comme un malfaiteur ? A moins que ce ne soit qu’une simple erreur de la part des chefs religieux ? (cf. Ac 3,17).
Accepter que cette mort de Jésus fasse partie du dessein de Dieu : « Ne fallait-il pas que le messie souffrit ? (Le 24,26), tel est le grand Seuil à passer ! Dieu a transformé cette mort abjecte en pardon, en résurrection !
Très tôt, une confession de foi jaillit : Jésus est « mort pour nos péchés » cf. kérygme cité par Paul (1 Co 15,3). Les disciples ont mis en relation : la mort de Jésus, le péché et l’accomplissement des Écritures. Le "pour" (uper en grec) exprime que nous sommes à la fois responsables et bénéficiaires de la mort de Jésus parce qu’elle dit un pardon absolu. Cela renvoie évidemment à la théologie sous-jacente du Serviteur souffrant : Il a été compté parmi les criminels, alors qu’il portait le péché des multitudes et qu’il intercédait pour les criminels (Is 53,12).
CEC :599-605 : la mort rédemptrice du Christ dans le dessein divin de salut.
613 : la mort du Christ est le sacrifice unique et définitif.
L’itinéraire de Saint Paul : « Dieu nous avait en lui aimés totalement »
Sans utiliser le terme, Paul voit le drame originel en Adam qui, dans le judaïsme apocalyptique remontait soit à Caïn, soit aux anges avant le déluge, soit au veau d’or (ou encore au péché de David). Il affirme en Rm 5 la réalité d’un péché qui remonte à Adam, c’est-à-dire aux origines et ce péché/divorce/colère concerne les juifs comme les païens.
Comment Saul de Tarse, pharisien zélé du courant officiel (Ac 22,3-11) en vient-il à confesser cela ? Muni des pleins pouvoirs pour arrêter les « adeptes de la Voie », sûr d’être dans le bon chemin, - de faire la volonté de Dieu, puisqu’il est un excellent pratiquant de la Torah - il entend enrayer cette doctrine déviante et dangereuse au nom de l’Alliance et la Torah données par Dieu à Moïse.
Sur le chemin de Damas, aveuglé par la lumière, il entend une voix : Je suis Jésus que tu persécutes (Ac 9,5). Il est alors conduit comme un enfant - non par la Torah, mais par un chrétien ! - pour recevoir le baptême : renaître à une vie nouvelle dans le Christ. C’est dire qu’il était totalement aveugle, alors même qu’il pensait appliquer la Torah. Un péché fondamental existe donc. La Torah est impropre à le discerner et à le guérir. Non seulement les adeptes de Jésus ne sont pas hérétiques, mais ils ont accueilli la vraie lumière, la Torah nouvelle qui seule peut les rétablir dans l’Alliance et qui lève le voile sur la Torah donnée à Moïse. Jésus est alors la clé des Écritures. Les yeux de Paul s'ouvrent à cette révélation d’en haut, déjà portée par une partie du peuple, aujourd'hui manifestée en Jésus : Mystère caché dans le silence des siècles éternels mais aujourd'hui manifesté (Rm 16,25-26).
Il constate aussi que des païens font le même type d’expérience : eux aussi ont accès en Jésus à la communion au Père ; c’est un véritable retournement qui lui fera dire à propos de ses privilèges juifs : Je considère tout comme balayures afin de gagner le Christ (Ph 3,8). Il réalise que juifs et païens ont tous besoin d’être sauvés (Rm 1) et que ce salut, Jésus seul peut le donner. Si Jésus seul peut guérir le péché, c’est sans doute à cause de la faute d’un seul qui a été à l’origine du drame. Jésus est le nouvel Adam.

Le péché originel chez saint Paul (Cf. Referen-Ciel : Rm 5,12-21) : « Le premier, Adam a eu la liberté » Paul pose un regard sur les origines à partir de la révélation de Jésus Christ dont il a bénéficié gratuitement, sans les œuvres de la Torah : ce n’est plus elle qui est aux fondements, mais Jésus, nouvel Adam. Paul, en contemplant le Christ, saisit la profondeur de l’amour de Dieu et, dans cette lumière, la gravité de la rupture d’Alliance originelle. Il souligne aussi la disproportion entre la grâce manifestée en Jésus et la faute « originelle ». La séparation fondamentale qui a provoqué la condamnation de Jésus et sa mort sur la Croix est abolie par son abandon filial au Père et par son offrande pour les hommes. Les récits d’apparitions expriment cette expérience de l’absolue gratuité de Dieu, de son Pardon, de la communion avec Dieu, du don de l’Esprit Saint pour tous : disciples et ennemis de Jésus, juifs et païens. [Fondements : p. 496-512 ; CEC : 615 : Jésus substitue son obéissance à notre désobéissance ; 616 : mort pour tous ]

 

Saint Irénée : «Dès lorsqu’il nous créait différents de lui-même, il n’était plus de perfection pour nous en dehors du retour à lui dans son amour »
Irénée contemple le dessein de salut de Dieu à partir du nouvel Adam : l’homme est créé bon, dans l’amour, mais inachevé. Il ne trouve son accomplissement qu’en Dieu.
De même, en effet, qu’une mère ne peut donner une nourriture parfaite à un nouveau-né, mais que celui-ci est encore incapable de recevoir une nourriture au-dessus de son âge, ainsi Dieu pouvait, quant à lui, donner dès le commencement la perfection à l’homme, mais l’homme était incapable de la recevoir, car il n’était qu’un petit enfant (nepios gar ên).
Mais cet enfant, usant mal de sa liberté, a lâché la main du Père.
Toute la vie du Christ est mystère de Récapitulation. Tout ce que Jésus a fait, dit et souffert, avait pour but de rétablir l’homme déchu dans sa vocation première :« Lorsqu’il s’est incarné et s’est fait homme, il a récapitulé en lui-même la longue histoire des hommes et nous a procuré le salut en raccourci, de sorte que ce que nous avions perdu en Adam, c’est-à-dire d’être à l’image et à la ressemblance de Dieu, nous le recouvrions dans le Christ Jésus (Saint Irénée, Adversus hæreses III, 18,1). [ CEC 518.]
 
Saint Augustin : C’est Augustin qui a élaboré ce qu’on appelle la doctrine du péché originel, qui a profondément marqué l’Occident chrétien : à partir de Gn 2 et 3, il affirme que le péché d’Adam se transmet de génération en génération par l’acte sexuel. La relation sexuelle prend alors une connotation très négative. Cependant saint Augustin confesse aussi la grâce originelle dans le Christ dans la droite ligne de saint Paul dans beaucoup de ses écrits : Je serai mort pour l’éternité, si tu n’étais pas venu dans le temps.(ct Entrer dans la foi p. 376).  C’est trop peu dire que nous pérégrinions au loin : nous étions incapables de nous mouvoir. Le médecin est venu vers les malades, le chemin s’est avancé vers les voyageurs. Laissons-nous sauver par lui, marchons par lui.
St Augustin, Comment. 1° épître de Jean, X, 1, SC n° 75
 
Aujourd’hui
La présentation d’Augustin a contribué à provoquer un rejet de la doctrine du péché originel, notamment au XX° siècle. Pourtant, aujourd’hui, l’homme a conscience de son impuissance à être heureux et qu’en recherchant son bonheur, il court le plus souvent à sa perte. Bien plus, le sentiment d’être dans un monde cassé, marqué par des forces du mal et de mort dépassant l’homme est prégnant dans les générations nouvelles : l’homme apparaît n’être capable que de détruire la création. L’homme du XXI siècle est conscient que des « structures de mort » le traversent et assujettissent le monde. Les deux grandes conceptions, présentes au temps de Jésus, se retrouvent :
• Certains ne voient là que le déploiement de ce qui se trouve dans la nature, une nature mélangée... Pour ceux-là, la solution est du côté de l’homme (pratique de la Torah pour les juifs, droits de l’homme ou consensus démocratique sur des valeurs pour d’autres, importance de l’éducation, etc.). C’est la position classique des sociétés sécularisées.
D’autres reconnaissent des puissances maléfiques dont l’intention est de détruire la Création et les créatures. Pour ceux-là, l’homme est incapable de se sauver lui-même, même avec les meilleures intentions, techniques, méthodes... Le salut vient d’ailleurs. C’est la position de plusieurs religions, mais aussi de groupes plus ou moins sectaires.
La foi chrétienne, héritière du judaïsme apocalyptique et se recevant de l’Alliance nouvelle révélée en Jésus et qui va jusqu’à la rédemption dans la Croix, confesse que Dieu a créé un monde bon - même s’il est limité et inachevé - parce que transfiguré dans son amour. Elle reconnaît la responsabilité de l’homme dans le mal, tout en affirmant l’existence d’un mal originel dont l’homme n’est pas l’initiateur. C’est Satan, le père du mensonge, qui est à l’origine du mal/péché (= rupture de la relation avec Dieu). En effet, seul Jésus sauve l’homme, qui, laissé à lui-même, erre, captif des ténèbres et de ce divorce originel. Mais Jésus descend dans les enfers et délivre la créature, non pas d’un mal abstrait, mais de Satan et de son emprise. La vision chrétienne est donc éblouie par la grandeur de l’homme et de la création et convaincue que cela vient de Dieu Amour. Elle est aussi consciente de la profondeur de la brisure originelle qui sépare de Dieu et convaincue que l’homme est à la fois victime et complice de cet enfer qui le dépasse, dont le Christ seul peut le délivrer.
Le CEC l’exprime à sa manière : n° 295 à 421.
 
 
[Gam 4S/198-204]
17 Le Christ nouvel Adam
Contemple
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Jésus était aux fondations. Dieu nous avait, en Lui, aimés totalement. Il était tout-puissant, il pouvait nous créer sans cette liberté qui nous permet d’aimer comme de refuser. Il aurait pu créer les forçats de l’amour, ou nous créer parfaits. Dès lors qu’il nous créait différents de lui-même, il n’était plus de perfection pour nous en dehors du retour à Lui, dans son Amour. Et c’est bien là que tout a commencé. Pour entrer en amour, il faut la liberté et le premier, Adam, a eu la liberté et le premier, Adam, a dû mal en user. Et nous tous, après lui, avons la liberté avec les habitudes et le poids du passé. Comme le sans-famille qui ne sait pas aimer, pleure en tuant son frère, repousse le baiser qui pourrait le sauver et s’enfuit loin de tout pleurant le souvenir. Et nous venons au monde comme des sans famille.
Et Jésus est venu, et nous l’avons tué. Mais nous avons appris de ces quelques instants où il était chez nous, que tout pouvait recommencer et qu’il nous suffisait de nous laisser aimer pour que la vie renaisse.