Ch04 §5 Vérité biblique et vérité historique ?

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Ch04 §5 Vérité biblique et vérité historique ? p 141

En étudiant toutes ces relectures, on en vient à se poser la question: Moïse a-t-il vraiment existé? Ou n'est-il qu'un précipité de traditions religieuses?

Un principe d'histoire des religions peut guider notre réflexion: l'initiateur d'une réforme religieuse, en quelque domaine que ce soit, doit miser sur ce qui ést considéré par ses contemporains comme réellement fondé, sous peine de ne pas réussir à aller au bout de son projet. Or l'entreprise d'Ézéchias, poursuivie par Josias, a réussi au point que Moïse est devenu le personnage principal dans le Nord comme dans le Sud. Si l'objectif a été atteint c'est que le personnage de Moïse était suffisamment ancré dans les mémoires d'un lointain passé ancestral, vraisemblablement semi-nomade, pour que, dans le dédale des alliances, il ait été sauvegardé comme le prophète majeur du credo commun. Cela, ajouté à tous les éléments relevés plus haut qui l'ancrent dans l'histoire, suffit pour rendre crédible son historicité et son rôle de législateur.

Le judaïsme et l'islam n'ont aucun intérêt pour cette reconstitution historique du passé. Il suffit au judaïsme que la Torah, « chiffre sacré », soit continuellement déchiffrée dans l'actualisation qu'en fait la tradition du peuple pour que l'alliance avec Dieu se pérennise. Il suffit à l'islam que le Coran continue à être lu, puisqu'il est la Parole même de Dieu.

Pour les chrétiens ces reconstitutions du passé, avec leur part d'hypothèses, disent les premiers pas de Dieu dans le sens de l'Incarnation. Ils ont une Importance capitale. C'est pourquoi les disciples du Christ tentent de retrouver les strates qui précèdent son arrivée dans le monde. Certes, la lumière projetée par les couches récentes ne permet pas toujours, à travers la glaciation du temps, de retrouver les premiers dépôts, mais la démarche est posée qui permet d'adorer l'enfant Dieu dans la crèche des premiers pas d'Israël.

Et le miracle de la mer ?

Au terme de cette étude sur les héros de l'Exode, une question demeure: le miracle de la mer a-t-il donc existé? Outre les versions de Déborah et du Jourdain, on a une version d'un marais desséché par un fort vent d'est (Ex 14,21), et, tissée avec elle, la version postexillque relue à la lumière du combat cosmogonique de Marduk (Ex 14,22s). Dans tous les cas il y a, chez les auteurs Inspirés, la conscience d'un événement miraculeux. S'il n'avait pas été partagé par la tradition des mémoires, il n'aurait pas pu s'écrire. Que le miracle ait réellement eu lieu comme il est raconté ou qu'il soit le fruit des ajouts successifs de la tradition, comme l'analyse littéraire semble le montrer, il a toujours été reçu comme écho de l'action miraculeuse de Dieu pour sauver son peuple..

Moïse au buisson ardent