Seuil-01-séquence-12 La démarche de notre foi
« Telle fut la démarche de notre foi en son commencement. »
Et si l'archéologie faisait de nouvelles découvertes ! Certes, elle aura encore bien des découvertes à faire et l'analyse du texte aussi. Mais cette double lecture en "Histoire Sainte" et en "Histoire du Salut", dans la mesure où elle va jusqu'au coeur de ce qui a inspiré à la fois les mémoires et leur relecture face aux événements, rend possible une lecture au niveau profond de la foi. Celle-ci se révèle en perpétuel effort pour répondre à ce qu'elle perçoit des prévenances divines.
Avons-nous trouvé la meilleure configuration historique à chacune des strates du texte ? Qui oserait le prétendre ? On peut tout juste dire que, dans l'état actuel des connaissances, elle est vraisemblable et suffit au chrétien pour retrouver les premiers pas de l'Incarnation dans une "Histoire du Salut" qui pour lui y conduit. Bien d'autres analyses peuvent être tentées, mettant l'accent sur d'autres paramètres que celui des "seuils de la foi".
Notre hypothèse permet, en mettant l'accent sur ce qui exprime le mouvement de la foi au-delà des événements qui la suscitent et des relectures permanentes qu'ils occasionnent, de rejoindre l'essentiel : le dialogue de foi qui s'instaure progressivement entre le croyant et Dieu qui le sauve ou lui donne, en le créant, le sens de sa vie et de sa présence au monde [...]
On le voit bien, c'est la foi qui a le dernier mot dans les recherches. Elle est, avec le politique, le paramètre heuristique le plus important. Contrairement au principe selon lequel une étude biblique doit évacuer la foi au nom de l'objectivité scientifique, il faut se rendre à l'évidence que seule la lecture croyante de la Bible va au bout des potentialités de son Écriture..
(Jacques Bernard LFB/201-202)
Mais... Abraham, Isaac, Jacob ... L'archéologie n'apporte que peu d'éléments sur ces personnages. Cependant, une étude attentive des textes montre qu'il est possible de retrouver des traces des patriarches, de Moïse, de David et de Salomon, dans des textes datant d'avant l'exil (-598) Abraham serait un ancêtre du sud dont on peut faire remonter l'origine au plus tôt à la période où Beer Sheva devient une cité (12e av. J.C. Jacob apparaît dans la littérature pour la première fois en Osée 12 (vers -750). Le texte le décrit comme un ancêtre du Nord, peu recommandable. Moïse apparaît dans la littérature avec Michée 6, 4 sous Ézéchias (vers -700). Pour David et Salomon, même si les écrits les concernant ne datent que de l'époque d'Ézéchias et Josias, on peut penser qu'ils étaient des figures suffisamment importantes dans la mémoire du peuple pour que ceux-ci les prennent comme emblèmes. Par ailleurs, un tell Dan datant du 9° siècle a été retrouvé avec l'inscription "maison de David". Ceci montre que vers -835, la maison de David était une référence connue à l'étranger (Damas).
Ces personnages ont été périodiquement réinterprétés, commentés par les auteurs de la Bible avant et après l'exil, dans le judaïsme, puis le christianisme. Ainsi, pour le peuple, ils sont ces ancêtres qui portent l'identité de la foi. Ce que le peuple découvre de la foi au fil de son histoire, il le leur attribue : par exemple, Abraham, dans les récits de Genèse, est déjà monothéiste !
Même si l'apparition de ces grandes figures bibliques est tardive dans la littérature, cela ne veut pas dire que ces ancêtres n'ont pas existé. On peut même penser qu'ils devaient être des personnages suffisamment importants dans la mémoire du peuple et porteurs de son identité, pour qu'ils aient été repris de la sorte. Pour que ces figures soient acceptées comme capables de faire l'unité et de mobiliser al foi, il fallait qu'ils soient des références fortes.
(Gam 1s/annexe 6.1)
"Telle fut la démarche de notre foi ..."
Déjà nous savons combien dans l'expérience humaine le "faire" et le "dire" nous trahissent... Israël aussi expérimente combien son Dieu se dévoile dans son action. Pour Dieu, dire c'est faire et faire c'est être. Ainsi la Parole de Dieu qui suscite Israël nous introduit-elle. dans le mystère divin. Nous l'approchons sans pouvoir le maîtriser, ni mette la main dessus, mais l'expérience de compagnonnage nous fait entrer en communion d'esprit et nous pouvons témoigner du nouveau visage de Dieu.
Dieu révèle d'abord l'étrangeté de son Nom. Pour les hommes, le nom scelle les destins; pour les dieux, il est la clé qui ouvre l'accès à leur présence. Or le nom du Dieu d'Israël demeure imprononçable. Il n'est dicible que comme un chemin raconté, le récit d'un trajet tourmenté. le mystère de Dieu ne peut être forcé; il demeure au-delà, mais il est à nos côtés.
Dieu ne se livre que par ce qu'il suscite : il agit et ainsi révèle les désirs de son coeur : voilà que surgit Israël. Il sauve ce peuple et crée en lui une autre manière de vivre le monde. Dans les chemins vécus ensemble, dans la joie de la délivrance, les malheurs du péché, les tâtonnements du discernement, les larmes du pardon, apparaissent peu à peu les linéaments d'une orientation.
Ainsi Dieu révèle sa Torah. Il n'émet pas ses ordres comme un chef ou un potentat: il appelle. Le peuple n'est pas fixé sur une voie sans retour: tout se joue en dialogue et Israël prendra sa part d'initiatives heureuses et malheureuses. Dieu se montre comme Celui qui désire un partenaire responsable: voilà pourquoi on peut dire que si Israël doit tout à Dieu, Dieu attend tout d'Israël. L'Histoire sainte est ce temps intermédiaire qui court entre l'appel divin et la réponse du peuple. Au lieu de s'évanouir comme une brume au soleil des mythes, l'histoire est soulignée par le Dieu d'Israël comme le temps favorable, le temps du salut, le temps des choix, le temps de la mémoire et des promesses, le temps dont Dieu attend tout et qu'il relance sans cesse. Ce temps n'est ni progrès ni regret: il est le temps de l'engagement de Dieu et de son patient désir. L'histoire d'Israël, c'est le temps qui lui est donné pour correspondre à ce qu'il est déjà dans le coeur de celui qui l'invite.
Il faudra du temps à Israël pour être Israël : mais déjà l'histoire révèle au peuple ce qu'il est pour Dieu et comment un Dieu s'est déclaré en sa faveur.
(Jean-Marie Beaurent, RTP/120)
"Ainsi vécurent les deux royaumes."
Tandis que le Nord, riche et cultivé, avait amalgamé foi en YHWH et culte à Baal, le Sud avait su sauvegarder son credo lors de l'alliance qui, au temps d'Achab (IXe siècle), l'avait contraint à laisser entrer le Baal phénicien. Sous la menace assyrienne, les guerres de proximité se sont tues, et ont fait front commun contre Salmanasar III en une guerre victorieuse à Qarqar (-853). Puis Achab et Josaphat roi du Sud reprirent leur guerre contre Damas à Ramot de Galaad, où meurt Achab (1 R 22, 29-38). Joram, le fils d'Achab, s'allie à Josaphat du Sud (-850) pour reprendre à Moab (2 R 3,4-27) les territoires perdus pendant la guerre contre l'Assyrie (stèle de Mesha). Quelques années plus tard (-842), Jéhu est sacré roi à Ramot de Galaad (2 R 9s) et le roi de Damas, Hazaël, massacre les deux maisons royales du Nord et du Sud, alliées de la Phénicie. Jéhu et des fervents du désert - qu'on appelait les Rékabites (2 R 10, 11-17) - prêtent main forte à cette épuration. Mais, en -841, Salmanasar III réapparaît. Jéhu lui paie tribut (obélisque de Kalah) et passe sous la tutelle de Hazaël de Damas. La tutelle étrangère et ses idolâtries ne faisait que changer de main. Le problème avait été le syncrétisme avec le Baal. Il allait maintenant se jouer avec le Dieu assyrien.
(Jacques Bernard, LFB/235)
referen-ciel : 1ère unité Nord-Sud
referen-ciel : Patriarches
referen-ciel : YHWH
Ainsi vécurent les deux royaumes, l'un et l'autre à son tour se voulant plus fidèle.
Au sud, il y avait la dynastie de David, une dynastie qui portait la marque de Dieu, il y avait le Temple.
Au nord, il y avait les prophètes, il y avait les sanctuaires, ceux qui avaient vu naître l'alliance avec Dieu.
Les années et les règnes allaient se succéder, chacun vivant au mieux son alliance avec Dieu.
Telle fut la démarche de notre foi en son commencement.
Alleluia !
Quand Israël sortit d'Égypte,
La maison de Jacob, de chez un peuple barbare,
Juda lui devint un sanctuaire,
Et Israël, le lieu de son empire.
La mer voit et s'enfuit,
le Jourdain retourne en arrière;
les montagnes sautent comme des béliers
et les collines, comme des agneaux
Qu'as-tu, mer, à t'enfuir,
Jourdain à retourner en arrière,
et vous, montagnes, à sauter comme des béliers,
collines, comme des agneaux ?
Tremble, terre, devant la face du Maïtre,
devant la face du Dieu de Jacob,
qui change le rocher en étang
et le caillou en source. Ps 114 (113A)
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