session-16-séquence-4-03 Mystère de Pâques
Onglets principaux

"La lumière de la Pâque..."
Le mystère se creuse (9,29) jusqu'aux origines divines de Jésus (16, 17, 18)... Le sens de la mort et de la résurrection de Jésus se révèlent comme trois grands passages, trois "Pâques" :
- de la mort à la vie de Jésus, entraînant le passage de la mort à la vie des disciples.
- de ce monde au père : ascension de Jésus, entraînant l'ascension de ses disciples avec la transmission de l'Esprit du Fils aux fils adoptifs.
- d'Israël aux nations : le Royaume concerne toute l'humanité et même toute la création.
« La nuit de ce samedi était bien avancée »
1- Comment envisager l’annonce de l’Évangile après la mort de Jésus ?
Après la mort de Jésus, l’annonce de l’Évangile reprend avec les caractéristiques de la vie de Jésus : Pierre prêche, rempli de l’Esprit Saint de Jésus (Ac 2,22-25). Miracle et prédication vont ensemble (Ac 3,13-19) ; la persécution se poursuit envers les apôtres (Ac 4-5). Pourtant, il y a aussi du neuf :
- l’Évangile est prêché à ceux qui n’ont pas connu Jésus et bientôt aux païens (Ac 10).
- la proclamation de la mort et de la résurrection de Jésus fait partie de l’Évangile, elle en devient le cœur.
- Pour les disciples, les autorités religieuses de Jérusalem sont déjugées : tout porte à croire qu’elles se sont trompées.
De toute évidence, l’affaire Jésus continue... Gamaliel, grand docteur de la Loi, conseille de laisser aller les adeptes de la Voie (Ac 9,2) afin de ne pas risquer de se mettre contre Dieu. Si c’est une affaire d’hommes, elle s’éteindra d’elle-même (Ac 5,34).
« Il se montre vivant »
2- Qu’est-ce que le « Kérygme » ?
Kérygme : Terme grec désignant à l’origine le roulement de tambour précédant une annonce de haute importance concernant tout l’Empire. Ce terme va désigner le noyau de l’expression de la foi pascale. Il est suivi d’une invitation à croire en Jésus : Ac 2,22-36 ; 5,29-32 ; 1 Co 15,1... (sommaires catéchétiques anciens).
Le kérygme produit un choc, met devant un choix : appel à croire en Jésus, à changer de vie, à se faire baptiser. Celui qui accueille le kérygme est convié à s’adjoindre à la communauté des croyants et à vivre de la vie de Jésus : écoute et mise en pratique de la Parole, mise en commun des biens, vie de prière et annonce de la Bonne Nouvelle.
Ce qui précède le verset 22 situe dans les derniers temps : la prophétie de Joël se réalise.
« Jésus le nazôréen » : le groupe des nazôréens est de la dynastie davidique, centré sur l’attente d’un messie politique et très opposé à Rome. Jésus est dit « nazôréen » : c’est ainsi qu’il a dû être identifié par les autorités juives de l’époque, ce qui justifie l’inscription sur la croix indiquant le motif de condamnation.
Il est prophète accrédité par Dieu avec des caractéristiques du courant apocalyptique.
Il a été livré et c’est le dessein de Dieu qui s’est mystérieusement accompli à travers cela. La culpabilité de ceux qui l’ont fait mourir est soulignée ; à entendre Pierre, tous ses auditeurs sont responsables de la crucifixion !
Si la culpabilité est soulignée, c’est pour mettre en lumière la grâce : Dieu l’a ressuscité ; la résurrection de Jésus est l’œuvre du Père.
4-Un Seuil de foi : «Par quel Seuil de foi faut-il encore passer ?»
La résurrection de Jésus est une Pâque qui recouvre bien des passages s’enracinant dans la vie de Jésus et dans l’expérience de foi d’Israël. Passage de la mort à la vie : Jésus vraiment mort est vraiment ressuscité. C’est bien lui, mais son corps n’est plus soumis à la corruption, au vieillissement, aux limites du temps et de l’espace. Il est désormais dans la gloire, vivant et présent, mais autrement. Passage de ce monde à son Père : Dieu n’impose jamais sa présence à ceux qui le refusent. Il remonte vers le Père, mais il reste présent à ceux qui croient en leur donnant son Esprit. Son exaltation est promesse d’exaltation pour ses disciples. Passage d’Israël aux nations : alors que Jésus avait essentiellement limité l’annonce du Royaume aux brebis perdues de la maison d’Israël, son Eglise annonce l’Evangile au monde entier. Cette triple Pâque manifeste que le pardon est donné à tous, y compris à ceux qui l’ont renié et à ceux qui le refuse, aux païens - ennemis d’Israël - comme au peuple élu.
Les disciples aussi ont à vivre une Pâque : Passage de la déception à la victoire de l’amour et du pardon de Dieu au-delà de toute espérance. Passage de la peur, honte, culpabilité à la paix et au pardon au-delà de toute mesure ; Passage des ténèbres du doute et de l’enfermement dans la tristesse à la lumière de la foi, à l’ouverture sur l’avenir et à la joie que nul ne peut ravir, o Ils devront apprendre un nouveau mode de présence de Jésus.
Jésus est le Seuil, la Porte : « Amen, amen, je vous le dis : je suis la porte des brebis. » Ce n'est pas seulement à Jean, disciple bien-aimé, que la porte ouverte dans le ciel a été montrée (Ap 4,1). C'est publiquement déclaré à tous : « Moi, je suis la porte. Si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé. »
5-La résurrection, œuvre du Père : « Le Christ parfait va maintenant s’accomplir. » Comment en parler ?
« Dieu l’a ressuscité » : Jésus a reçu du Père la résurrection. « Il se montre vivant. » : cette résurrection n’est pas une évidence, ni le résultat de quelque chose qui viendrait de la part de ses disciples, ni même de leur foi. L’initiative est du côté de Dieu. Elle reste cachée aux yeux du monde. Le Christ se donne à voir à ceux qu’il choisit. Les témoins des apparitions ne sont pas des purs, mais des pécheurs, qui ont été lâches, qui doutent, hésitent... Cette œuvre du Père est accomplie et confirme ce que Jésus a inauguré avant Pâques. Dans l’AT (2 M 7 et Dn 12), la résurrection des morts annonce les temps nouveaux ou la fin des temps. Si Dieu a ressuscité Jésus, c’est que la fin des temps est là... ou le commencement d’un monde nouveau, d’une création nouvelle. Ces caractéristiques sont dans la ligne de ce qu’lsraël - en particulier le courant apocalyptique - a reçu de Dieu : son amour tout puissant crée, recrée et ressuscite, son œuvre de bonté surprenante, nouvelle, dépassant ce que l’homme peut attendre, et aussi son l’humilité.
Pâques- Ascension - Pentecôte : évènements et fêtes inséparables
Referen-ciel : Ac 2, 22-26 (conclusion)
Ce premier kérygme de Pierre remonte à la primitive Eglise, lorsqu'elle apprend encore à relire l'événement JESUS, notamment sa mort et sa résurrection à la lumière des Ecritures.
Elle le fait selon une méthode connue des juifs : le pesher : on part de l'événement et on cherche dans les Ecritures ce qui éclaire l'événement. Cette méthode diffère du midrash pratiqué majoritairement dans le judaïsme, où on part d'un verset, ou d'un passage de l'Écriture pour en explorer tous les sens possible.

3-Comment rendre compte d’apparentes contradictions : Jésus remonte-t-il au ciel le jour de Pâque (Lc 24) ou bien 40 jours après Pâques (Ac 1) ? Ou sur la Croix (Jn 19) ? Le don de l'Esprit Saint a-t-il lieu à la fête de Pentecôte (Shavouot), 50 jours après Pâques, ou bien le jour de Pâques (Jn 20) ? Ou bien sur la Croix (Jn 19) ? Il y a plusieurs expériences d’effusion de l’Esprit (Ac 2 ; 4 ; 13).
Ces contradictions indiquent que l’expérience déborde le récit que l’on en a fait et échappe à une chronologie précise. Ce qui est certain, c’est que très tôt, les expériences pascales ont été inscrites et célébrées dans des calendriers liturgiques différents.
1-Les pèlerins de la diaspora qui viennent occasionnellement à Jérusalem pour les fêtes (Soukkot, Pesar, Shavouot) n’ont que quelques jours pour célébrer la mort de Jésus, sa résurrection, son exaltation, le don de l’Esprit (Mt 27,50-54 ; Lc 23,43 ; 24,50-51 ; Jn 19,17s).
2-Les disciples qui sont sur place suivent le calendrier juif : 40 jours après Pesar, c’est l’Ascension (Ac 1,3-11 // 2 R 2) et la descente de l’Esprit est célébrée à Shavouot, 50 jours après Pesar, comme fête du renouvellement de l’Alliance (Ac 2,1ss // Jl 3).
L’Ascension et le don de l’Esprit sont racontés à la lumière de l’Ancien Testament : Jésus, tel un nouvel Élie, remonte au ciel et donne son Esprit à ses disciples (2 R 1,18). Cette ascension a lieu sur le mont des Oliviers (Ac 1,12) comme la Présence/gloire était sortie du Temple pour reposer sur le mont des Oliviers avant d’aller rejoindre les exilés (Ez 11,23-24).
6-« La lumière de la Pâque » : Quel sens donner à la Pâque de Jésus ?
La résurrection de Jésus, objet de réduction, sujette à de fausses interprétations : Elle n’est pas une reviviscence ou la réanimation d’un cadavre (comme pour Lazare). Pourtant, Jésus n’est pas un esprit, il est ressuscité dans la chair. Il mange avec ses disciples. (CEC 989- 990) Elle n’est pas une réincarnation, même si sa présence se donne à toucher et à voir à travers ses disciples. Elle n’est pas un souvenir que l’on ravive, même si sa présence se fait mémoriale, en particulier dans l’Eucharistie. Elle n’est pas le résultat d’un agir de fidélité au défunt qui le rend présent (CEC 646), même si où sont amour et charité, Dieu est présent. Elle n’est pas le résultat de la foi des disciples. Celle-ci est plutôt conséquence de la résurrection de Jésus, même si Jésus se donne à voir essentiellement à ceux qui l’ont connu. Elle n’est pas une preuve de sa divinité, même si elle atteste qu’il est Seigneur et Christ.
La résurrection de Jésus est dévoilement et accomplissement : Confirmation du Royaume : Jésus est vraiment l’Envoyé du Père et il a vraiment apporté son Règne sur la terre. Toute la vie de Jésus (gestes, paroles, signes) prennent une densité nouvelle et un sens plus plénier (Ac 2-3). Pardon donné gratuitement à ceux qui ont renié, et qui s’exprime dans la paix donnée par Jésus et l’envoi en mission (Jn 20,21). Bénédiction jusqu’à transformer la malédiction de la Croix en bénédiction (Ga). Le refus des hommes n’est pas le dernier mot, Jésus l’a pris jusque dans la mort. Confirmation du nouvel Israël fondé par Jésus et dont les apôtres sont les colonnes : témoins de la vie de Jésus, pécheurs pardonnés, envoyés pour offrir le pardon divin (Jn 20). Accomplissement des Écritures qui, à la lumière de la Résurrection, prennent un sens nouveau... Leur sens véritable est dévoilé (Le 24 : pèlerins d’Emmaüs, Ac 8 : Serviteur souffrant.) Victoire de l’amour de Dieu sur le péché des hommes, en même temps que le dévoilement de l’aveuglement et des ténèbres des hommes. Confirmation de la vérité et de la divinité de Jésus (CEC 653). Salut universel : ce salut concerne non seulement ceux qui croient en Jésus, mais tous les hommes, ceux qui le rejettent et qui l’ignorent. Il concerne même toute la création (Rm 8). Signe et sceau de l’œuvre du Père commencée avec la création du monde et accomplissement de l’histoire. La résurrection de Jésus est à comprendre à la lumière de l’économie du salut (Seuils de foi précédents). Elle accomplit et atteste la « petite résurrection » à l’œuvre dès avant Pâques. Elle est un mystère surabondant de grâce, tel un soleil aux multiples rayons dont nous avons sans cesse à accueillir la lumière et la chaleur.
7-«L’amour de l’Époux » : Les noces accomplies ?
Jésus a été perçu comme l’Époux : « Les invités à la noce peuvent-ils jeûner quand l’Époux est là ? » Titre divin (Os 2 ; Is 54), sa résurrection est l’accomplissement des noces inaugurées à Cana (Jn 2) et scellées dans le sang de la Croix. Ces épousailles attendues par toute une partie d’Israël sont désormais offertes en Jésus à l’humanité toute entière : Allez enseigner toutes les nations ! Nous sommes maintenant dans le temps où « l’Époux est enlevé » : les chrétiens doivent apprendre à vivre en intimité avec l’Époux présent dans les « signes », qu’il laisse à l’Épouse, mais en même temps, l’Époux leur est enlevé, il est remonté vers le Père. Comment donc vivre de cette vie et de ce nouveau pardon ? Le Royaume, Jésus lui-même, sa résurrection, continuent pourtant d’être refusés : le péché demeure ancré dans le cœur de l’homme et la mort du Fils Bien Aimé sur la Croix révèle sa profondeur... Le pardon et la vie nouvelle que Jésus et le Père donnent par la Résurrection sont à recevoir et à vivre dans l’Esprit au sein d’un monde blessé, marqué par le péché et ses conséquences. Tout est donné, mais il reste à accueillir et à vivre ce don à l’ombre salvifique de la Croix : la vie en Christ suppose de se reconnaître pécheur, de vivre un chemin de conversion en accueillant le pardon, en sachant que, de son côté, la victoire est acquise. « Je ne veux connaître que Jésus et Jésus crucifié. » À ses disciples, Jésus a promis l’Esprit consolateur, le défenseur (Paraclet) afin de vivre sa présence et son pardon d’une manière autre, sous l’influence de l’Esprit du Christ, précisément. Désormais, le disciple doit vivre dans la grâce du deuxième pardon. « ...Le connaître lui avec la puissance de sa résurrection et lui devenir conforme pour tâcher de saisir, ayant été saisi moi- même parle Christ Jésus » (Ph 3). Tel est l’objet du combat spirituel chrétien.
La nuit de ce samedi était bien avancée, c'était même le matin, la lueur d'une Pâque, la lumière de la Pâque et l'on n'y tenait plus d'aller voir au tombeau. Et c'est à ce moment qu'il se montre vivant. On voudrait le toucher comme on aurait pu le faire quelques jours plus tôt mais ce n'est plus possible. Il est encore plus mystérieux qu'avant. Et ce n'est pas fini, il faut encore veiller, veiller et prier, et puis veiller encore. Le Christ parfait va maintenant s'accomplir, prendre taille divine où, dans l'embrassement, il contiendra le monde et rejoindra le Père. Allez, enseignez les humains, faites-leur partager l'amour qu'il vous a donné qui brûle et transfigure sans rien laisser de cendres, qui brûle et transfigure sans rien défigurer et qui fond au creuset sans pourtant rien tuer. L'amour de l'époux, de l'époux qui vient, de l'époux qui est là. Par quel chemin faut-il encore passer ? Par quel seuil de la foi faut-il encore passer ?