session-15-séquence-3-11 Controverses
Onglets principaux

"Certains cherchaient à le piéger..."
Cette séquence évoque, à travers l'impôt à César, les oppositions à Jésus. Elles deviennent plus tranchées.
« Il enverrait Élie et referait des signes comme au temps de Moïse. »
1-Comment Jésus est-il perçu dans le courant apocalyptique ?
Élie et Moïse sont attendus pour la fin des temps ou pour l’annonce de temps nouveaux. Il y aura alors des signes et des prodiges annoncés par les prophètes. Jésus n’est-il pas ce nouvel Élie-Elisée qui apporte la miséricorde du Père, un nouveau Moïse ? Ne réalise-t-il pas les promesses d’Isaïe ?
2-Comment est-Il perçu dans le courant officiel ?
Jésus n’est conforme ni à la pratique de la Torah ni au temple, il n’observe pas les jeûnes (Mt 9,14-17), il guérit le jour du Shabbat (Jn 9,1-16) et enseigne de sa propre autorité (Sermon sur la Montagne Mt 5-7). À la fin de son ministère, Jésus est durement contesté et les tenants du courant officiel cherchent à le piéger sur des points litigieux : paie-t-il l’impôt à César, croit-il à la résurrection, quel est le plus grand commandement, faut-il attendre le « messie d’Israël » ?
« Certains cherchaient à le piéger... »
3- Qu’appelle-t-on « Controverses » ?
Titre habituel donné par les exégètes à Mc 12 qui rassemble des récits de controverses sur ces points litigieux. Ils reprennent des méthodes juives de contradiction pour mettre en lumière l’enseignement de Jésus dans sa nouveauté.
Les Juifs sont-ils tenus de payer l’impôt à César ? oui, mais ils ne peuvent avoir sur eux et dans la ville sainte une monnaie païenne (à l’effigie de César = idolâtrie). Ils doivent aussi verser la dîme au Temple.
Faut-il croire en la résurrection des morts ? N’apparaissant pas dans le Pentateuque, les Sadducéens considèrent qu’elle n’est pas un article de foi. Mais elle est admise par la majorité des Juifs, notamment les Pharisiens, même si de multiples manières d’envisager la vie après la mort existaient.
Quel est le plus grand commandement ? C’est le "Shema Israël" : « Écoute Israël, le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout cœur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir » (Dt 6,4-5). Il ne fait pas partie du Décalogue, mais précède la récitation des commandements, ceux envers Dieu et ceux envers le prochain qui ne peuvent jamais être confondus.
Faut-il attendre le « messie d’Israël» et quel sera-t-il ? À l’époque, c’est un sujet brûlant sur lequel les groupes et mouvements religieux spéculent. Ce titre a une connotation politique, car le messie royal qui ne peut venir que du ciel, a vocation de restaurer le Royaume d’Israël. Sera-t-il « fils de David » ? de Bethléem ? Le courant officiel, lui, n’a que faire d’un messie personnel ; le messie n’est autre qu’lsraël lorsqu’il est ajusté à la Torah à la fin des temps.[Gam 3S / 129-131]
Travail : émission 43 RCF de Jacques Bernard
« À moins qu’il n’ait le pouvoir de tout transfigurer … »
4-D’où vient l’autorité de Jésus ? (Cf. Marie-Odile, Spa)
Jésus refuse de répondre à cette question des chefs religieux (Mt 21,23-27). Il la renvoie sur Jean Baptiste, reconnu lui aussi comme « prophète » par les foules. À cause de cela, il ne peut être arrêté. On peut comprendre le malaise : imposteur ? faux messie ? doux rêveur ? À moins que Dieu ne soit vraiment en train de faire du neuf. Mais qui peut le garantir ? Quand nous interrogeons Jésus, souvent, au lieu de nous répondre, il nous pose une question. Ainsi procédait-il avec les docteurs d’Israël. Nous craignons instinctivement ces questions de Jésus. Mais c’est en accueillant, en aimant les questions posées par Jésus que, déjà, nous entendons la réponse.
Autorité unique avec laquelle Jésus parle. Les Juifs étaient frappés de sa doctrine, parce qu’il parlait "avec autorité". Cet accent d’autorité : aussi bien quand Jésus s’adresse à nous dans le secret de notre âme que lors des épisodes relatés par l’Évangile. Il y a là un puissant motif de croire à la parole du Maître. Qui donc peut parler ainsi ? Quel homme oserait exiger cette soumission inconditionnelle ? (Un moine de l’Église d’Orient, Jésus, simples regards, ch.13, p54)
« La nouveauté de Dieu au jour de son retour.»
5- Quelle conscience Jésus avait-il de lui-même ?
Dans le Royaume, dans le simple regard de Jésus, l’homme se découvre « un-être-pour-Dieu », appelé à être « fils », c’est-à-dire se recevant totalement du Père. Il découvre aussi que ce n’est possible que par l’accueil de la Parole de Jésus et par la communion avec le Fils. Sa conscience n’émerge-t-elle pas à travers sa relation au créé, aux autres, à l’autre et de manière incomparable à travers sa relation avec Dieu ? Mais le Royaume révèle aussi à l’homme la profondeur de son refus, sa capacité à se fermer à l’amour gratuit, au pardon fou de Dieu. Ce n’est que dans la reconnaissance de sa pauvreté, de son insuffisance, de sa petitesse et de sa nature abîmée par le péché que l’homme peut renaître d’en haut. Si Jésus est un mystère, notre réponse, nos "oui" et nos "non" ont eux aussi une part de mystère. En effet, accueillir le Royaume, accueillir Jésus lui-même est une grâce. Cette grâce nous ne pouvons que la demander avec foi et humilité.
Jésus a demandé aux autorités religieuses de Jérusalem de croire en Lui à cause des œuvres de son Père qu’il accomplit. Mais un tel acte de foi devait passer par une mystérieuse mort à soi-même pour une nouvelle « naissance d’en haut » (Jn 3,7) dans l’attirance de la grâce divine. Une telle exigence de conversion face à un accomplissement si surprenant des promesses permet de comprendre la tragique méprise du Sanhédrin estimant que Jésus méritait la mort comme blasphémateur. Ses membres agissaient ainsi à la fois par ignorance et par l’endurcissement (Mc 3,5 ; Rm 11,25) de « l’incrédulité » (Rm 11,20). CEC 591. [Gam 3S /131-133]
Travail : émissions 41-42 RCF de Jacques Bernard
« Il enverrait Élie et referait des signes comme au temps de Moïse. » Pour le courant apocalyptique : Jésus accomplit ces signes : purification de lépreux (Mc 1,40), résurrection du fils de la veuve (Lc 7,12), guérison de la femme hémorroïsse (Mt 14,20-22), multiplication des pains d’orges (Jn 6,1-6) n’en sont-ils pas les signes ? Élie remonté au Ciel ne viendra-t-il pas révéler la Torah céleste et jeter un feu sur la terre (Lc 12,49) Nouveau Moïse Jésus marche sur les eaux (Mt 14,22-33), multiplie les pains (Mc 6,31-46), donne une manne nouvelle, c’est-à-dire une Torah nouvelle (Mt 5-6-7) et mène le peuple vers la Terre promise. Et Jésus réalise les promesses d’Isaïe (Mt 11,2-6 : les aveugles voient, les boiteux marchent et la Bonne nouvelle est annoncée aux pauvres (Is 61)...)
« Pour l’instant, on n'avait d’autre guide que la Loi. » Pour le courant officiel, Jésus n’est conforme ni à la pratique de la Torah ni au Temple :
L’impôt à César (Mc 12,13-17) : La question posée par les Hérodiens (pro-romains) et les Pharisiens est un piège. Refuser de payer l’impôt à César, c’est mettre en péril la paix du peuple :Si Jésus répond "non", il entre dans le jeu politique et se fait récupérer par les uns comme « messie politique » et accuser par d’autres d’être en rébellion contre Rome. S'il répond "oui", il entre également dans le jeu politique et se fait récupérer par les uns comme « pro-romain » et accuser par d’autres de collaboration. À moins que son Royaume ne soit que « spirituel », sans implication concrète pour la vie d’Israël ?Jésus déjoue le piège : ne portent-ils pas sur eux de la monnaie à l’effigie de César ? Ils sont donc en infraction vis-à-vis de la Torah ? Que viennent-ils lui faire la leçon ?
La résurrection des morts (Référen-Ciel : Mc 12,18-27)
Le grand commandement (Mc 12,28-34) : pour les Juifs, les commandements envers Dieu ne peuvent être mis au même niveau que les commandements envers le prochain. Or, à la question : Quel est le plus grand commandement ? Jésus répond en unissant Dt 6,5 (amour envers Dieu) et Lv 18,19 (amour envers le prochain) comme le fait la Septante qui fait précéder le décalogue du Shema (Dt 6,5). Dans le Royaume, Dieu et le prochain sont sur le même plan. La parabole du Samaritain (Lc 10,25-37) abolit même la barrière entre Juifs et hérétiques ou païens. Désormais l’homme est restitué à l’image de Dieu (Cf. Mt 5-6). (Fondements p.383- 384)
Le messie davidique (Référen-Ciel : Mc 12,35-37). Conclusion : Jésus confirme que le Royaume est pour ici et maintenant en même temps qu’il refuse toute récupération politique ou religieuse. Pharisiens, Hérodiens, Sadducéens, scribes, foule, tenants du courant officiel ou du courant apocalyptique, tous doivent accepter de s’ouvrir à la nouveauté du Royaume.
Mais les autorités religieuses se durcissent face à toute annonce prophétique, que ce soit la sienne ou celle de Jean : « Jean vient en effet, il ne mange ni ne boit et l’on dit : "C’est un possédé !" Vient le fils de l’homme qui mange et qui boit et l’on dit : "C’est un glouton et un ivrogne !" Mais Dieu accomplit son œuvre d’ajustement à travers tous ses enfants. » (Lc 7,31- 35), c’est-à-dire à travers Jean, comme à travers Jésus. (Fondements p.385 : 1er §)[Gam 3S / 126-131]
« À moins qu’il n’ait le pouvoir de tout transfigurer … » 4-D’où vient l’autorité de Jésus ? «Je n’ai pas parlé de moi-même, mais le Père qui m’a envoyé m’a lui-même prescrit ce que je devais dire et faire entendre » (Jn 12,50). Sa Parole ne vient pas de lui. Ce qu’il dit, il le vit et le donne à vivre à ceux qui croient. Ce qu’il annonce requiert donc la foi. Ce qui l’accrédite, c’est qu’il fasse des disciples, prémices d’un peuple nouveau, l’Église qui, aujourd’hui encore, se réfère à Lui. Son autorité, Jésus la reçoit de son Père et des œuvres qu’il accomplit. Sa relation au Père et ses œuvres sont les seules garanties qu’il donne à voir. Les auteurs du Nouveau Testament, en particulier des évangiles, peuvent discerner dès avant Pâques l’autorité divine de Jésus. Cette autorité sera attestée par la résurrection de Jésus et par la manifestation de son Esprit.
Seule l’identité divine de la personne de Jésus peut justifier une exigence aussi absolue que celle-ci : « celui qui n’est pas avec moi est contre moi » (Mt 12,30) ; de même quand il dit qu’il y a en lui plus que Jonas... plus que Salomon » Mt 12,41-42, plus que le Temple (Mt 12,6) ; quand il rappelle à son sujet que David a appelé le Messie son Seigneur, quand il affirme « avant Abraham fut, je suis » (Jn 8,58) ; et même, « le Père et moi sommes un » (Jn 10,30).(CEC 590)
(Cf Edith Herbeau Spa : Image et ressemblance)
« La nouveauté de Dieu au jour de son retour.» 5-Quelle conscience Jésus avait-il de lui-même?En fait, la question se pose d’abord pour la conscience humaine ! Quelle conscience ai-je de moi-même et de qui je suis ? L’homme demeure à bien des égards, un mystère pour lui-même. Une chose cependant peut éclairer un peu : à moins d’avoir affaire à un être schizophrène, la conscience que Jésus avait de lui devait correspondre au minimum à la conscience qu’il permettait au croyant d’avoir de Lui. Si Jésus est vraiment homme, et vraiment fils, il se reçoit totalement du Père. Et s’il est vraiment Dieu, comment pourrions-nous définir ou analyser sa conscience ? Déduire la conscience de Jésus de ce que nous connaissons de celle de l’homme serait inévitablement la réduire à ce qu’on croit connaître. Si la conscience humaine est un mystère, à plus forte raison, celle de Jésus nous échappera-t-elle toujours. N’est-ce pas plutôt Jésus qui révèle à l’homme ce qu’il est et qui est Dieu ?
Pourtant, il est possible de dire quelque chose de la conscience de Jésus à partir de ce que ses contemporains ont perçu et transmis de lui ; en effet, les Évangiles laissent transparaître que Jésus se savait totalement investi de l’annonce du Royaume et qu’il avait une conscience aigüe de l’unicité de sa relation avec le Père (Le 10,21-23). Il apparait totalement abandonné, recevant tout du Père, au jour le jour, vivant pleinement la réalité du moment présent, sa relation au Père et aux hommes. La conscience de Jésus était éminemment filiale : conscience d’être le "Fils" par excellence en qui le Père se donne totalement. En même temps, Jésus s’est reçu de la foi, de la culture et du langage de son temps. Il a accepté d’être « nommé » par ses proches, d’être interprété par ses contemporains, sans pourtant se laissé enfermé dans ce que l’on a pu comprendre et dire de lui, ni s’y laissé réduire. (RT/435-437)
[Gam 3S /131-133]
Le mystère de Jésus grandissait … Qui nous dirait enfin s’il était le Sauveur ou si ses prétentions n’étaient qu’idolâtries ? Pour l’instant, on n’avait d’autre guide que la Loi, Torah voulue par Dieu avant l’aube des mondes. Tout ce qui n’était pas conforme à elle était idolâtrie. Et Jésus n’y était pas conforme ! ...À moins qu’il ait pouvoir de tout transfigurer, et même cette Loi. Certains parmi nos sages aimaient à se représenter ainsi la nouveauté de Dieu au jour de son retour. Il déconcerterait. Mais pour ne pas laisser son peuple dans la nuit, il enverrait Élie, et referait des signes comme au temps de Moïse. Tant de choses en Jésus évoquaient ce retour. N’était-il pas Élie ? Son zèle à purifier le Temple toutes ses guérisons, et combien de miracles... N’avait-il pas aussi, comme autrefois Moïse, multiplié les pains d’une manne nouvelle et marché sur les eaux ? Certains cherchaient à le piéger pour qu’il lève le voile : « Faut-il ou non payer l’impôt à César ? » S’il disait « oui », il n’était plus qu’un collaborateur, s’il disait « non », il aurait à sa suite, pour chasser les Romains, ceux pour qui le Royaume se conquiert par l’épée... Et l’on y verrait clair ! « Regardez cet écu. De qui porte-t-il l’effigie ? » « De César, Maître. » « Eh quoi ! Vous tolérez qu’on use en la ville sacrée de pareilles monnaies, et vous me critiquez ! Allez rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. »