Document-Théo-Philo: Eucharistie, Marthe Robin [GAM-4s/annexe 9.4]

Si l’on me demandait : que vaut-il mieux faire, l’oraison ou la Sainte Communion ?
Les deux sont vivement à conseiller, mais s’il faut porter une préférence, je crois que je répondrais : l’oraison, car l’oraison est une disposition et une préparation immédiate à la sainte Communion.
« Que l'homme s’éprouve lui-même avant de manger de ce pain et de boire ce calice ». Or, comment s’étudier, se connaître, s’assurer de la fidélité de son amour, si ce n’est par l’oraison.
L’oraison prépare l’âme à la Sainte communion, elle est le fruit de la bonne Communion. Une communion sans préparation et sans action de grâces, faire l'une et l’autre sans le recueillement de l'oraison est de bien peu d’utilité pour l'âme. « Méditez souvent sur vos fins dernières, dit l’Esprit-Saint, et vous ne tomberez jamais dans le péché » ou « Souvenez-vous dans toutes vos actions de votre fin dernière ».
La Communion fréquente est un conseil, l’oraison est un divin précepte. « Priez, priez sans cesse. » Or, il est difficile de bien prier et de prier sans cesse si le cœur ne se remplit pas de bonnes, de saintes pensées, fruits de la méditation
Il en coûte plus de faire oraison que de communier. La Communion est un acte extérieur qui est en lui-même un plaisir, une consolation, une joie pour l’âme... L’oraison qui est un entretien secret entre Dieu et l’âme, dans les commencements surtout, est au contraire un assujettissement et une peine... elle demande beaucoup plus d’efforts. La Communion sacramentelle peut d’ailleurs ne pas être possible pendant un très long intervalle à cause de différentes infirmités que Dieu envoie à sa créature pour l’éprouver et cette privation, lorsqu’elle ne dépend pas de nous, n’empêche pas la sainteté. Et l’oraison, pendant que peut et doit se faire la Communion spirituelle, est toujours possible, ne serait-ce que quelques minutes.
La Communion ne suppose pas toujours la vertu. On peut communier et se rendre coupable du Corps et du Sang de Notre Seigneur. L’oraison de chaque jour ne veut pas dire qu’on soit vertueux, elle est cependant une preuve qu’on travaille sérieusement à le devenir.
Quelqu’un a dit : on trouve des chrétiens qui communient tous les jours et qui sont en état de péché mortel, des chrétiens qui font des aumônes abondantes et qui sont en état de péché mortel, des chrétiens qui se mortifient en toutes manières et qui sont en état de péché mortel. Mais on ne trouve jamais une âme qui fasse oraison tous les jours et qui demeure dans le péché.
Qu’en lisant ces lignes, mon père spirituel ne se méprenne pas sur mes intentions et n’y voit pas un ralentissement dans l’empressement et l’ardeur de mon âme à faire la Sainte Communion.
J’ai seulement voulu parler de l’erreur dans laquelle sont certaines âmes qui s’inquiètent beaucoup d’une communion qu’elles n’ont pas pu faire et qui ne se soucient pas d’une oraison qu’elles auraient pu faire et qu’elles ont volontiers abrégée ou manquée, qui demandent avec insistance et importunité, de remplacer une communion, et qui ne se mettent pas en peine, le pouvant facilement, de remplacer une oraison.
Oh ! nous qui savons le don de Dieu et qui connaissons ses desseins sur nous, faisons-nous une obligation de ne jamais laisser volontairement l’oraison, de la remplacer si nous avons dû l’abréger ou la laisser. Nous souvenant que tout comme la communion, l’oraison négligée laisse une lacune dans la journée d’une âme toute donnée à Dieu.
Un très grand saint a fait remarquer très sagement qu’il faut toujours faire précéder la réflexion avant l’action. Autrement dit, il faut que les opérations de la vie active soient précédées et même sagement entremêlées de celles de la vie contemplative, pour la raison que si on peut bien entrer dans le Ciel sans la contemplation parfaite, on ne peut guère marcher avec joie dans la voie du Salut ni porter courageusement le joug du Seigneur sans une sorte de contemplation.
Voilà ce que les Pères de l’Eglise ont bien compris, et c’est pourquoi ils veulent que l’oraison se fasse au commencement du jour, avant que chacun vaque aux occupations de sa charge.
Sage, très sage mesure ! Non moins sage celle qui sème les exercices pieux tout le long du jour !
C’est Marie venant au secours de Marthe.
Non, celui qui ne médite plus les vérités éternelles ne peut sans miracle, vivre en parfait chrétien. Il est bien difficile en effet de résister à la tentation sans la méditation qui donne un tact délicat des choses saintes, et comme une divination des choses surnaturelles.
Toute la terre est désolée parce que personne ne réfléchit ! ! !
Marthe Robin : 4 avril 1930