Document-Esthétique : Commentaire du tableau 1 Co 15 de Françoise Burtz
Le texte de saint Paul sur la Résurrection des morts parle du passage de la mort à la vie, du passage de la vie d’en bas à la vie d’en haut ou, de la vie psychique à la vie dans l’Esprit. Tout le tableau exprime ce passage qui se fait par Jésus, par sa mort et sa résurrection, par la Croix.
Saint Paul dit : l’Évangile que vous avez reçu, gardez-le tel que je vous l’ai annoncé. Ne le faites pas à votre mesure, ne le ramenez pas à votre horizon. Et il rappelle le kérygme : « Christ mort pour nos péchés selon les Écritures, mis au tombeau, ressuscité le troisième jour, apparu à Pierre, puis aux Douze. » Puis, il aborde le sujet qui préoccupe les Corinthiens : Ceux qui sont morts peuvent-ils ressusciter ? Comment peut-on ressusciter ?
Cela nous renvoie au cœur de l’Évangile, au cœur du troisième Seuil : le Royaume inauguré par Jésus est déjà résurrection, mais quelle est cette résurrection annoncée par Jésus ? Il est passage de la vie mortelle à la vie immortelle, de la finitude à la vie éternelle.
Pour Paul, comme pour les disciples du Christ, péché et mort sont liés, pardon et résurrection aussi. Le refus de croire, c’est le péché et le péché, c’est la mort (1 Co 15,56).
En bas du tableau, à gauche, Adam pleure : la mort est venue par un homme (Rm 5) c’est par un homme aussi que vient la résurrection le nouvel Adam sur la Croix (1 Co 15,45).
Comme tous sont morts en Adam, tous sont appelés à vivre de la vie nouvelle dans le Christ. Ainsi, les deux Adam se répondent et embrassent l’humanité et la Création.
Ce passage de la mort à la vie se fait en Jésus tout entier obéissant et abandonné au Père ; il est ‘charnière’, ‘porte’, ‘seuil’ entre le monde soumis au Mauvais (Rm 8) et la Vie. Cette victoire sur la Mort, Jésus la fait advenir par sa prédication en apportant le pardon du Père gratuitement, en apportant une vie nouvelle aux horizons de Dieu qui est destruction du règne de la mort.
Dans le monde d’en bas : Israël avec le long mûrissement de sa foi, passant par la Torah et Moïse, sort de l’idolâtrie. Les prophètes, chacun à leur manière, y ont aidé.
Mais la première Alliance reste encore dans les ténèbres et devient elle-même ténèbres, si elle ne s’ouvre pas à l’apocalypse de Jésus. Un des prophètes, le visage renversé vers le haut, est déjà tout illuminé de la réouverture du Ciel. C’est aussi la prophétie de Za 12,10b : Ils regarderont vers celui qu’on a transpercé. Les deux autres prophètes scrutent d’autres directions...
Sous le Crucifié : le miraculé, les Évangélistes, les disciples, les apôtres vont être signes et sacrements du Fils dès ici bas : c’est déjà l’Eglise, les pieds dans l’eau du baptême.
Dans le monde transfiguré, au dessus du Crucifié : la nouvelle Ève - au lieu de prendre comme en Canaan les forces de vie - est toute accueil, toute adoration, en position d’orante.
Au- dessus d’elle, l’homme encore androgyne, homme et femme (Gn 1,27) dit la Création dans son état originel. Aux pieds du Père, le nouveau-né, tête, se nourrit de la vie de Dieu. En haut, à gauche, un fou de Dieu, est brûlé par le buisson ardent de l’amour du Père du Fils et de l’Esprit. Un autre au-dessus semble littéralement aspiré par le Père et le Fils.
Au centre et au sommet, le Père, les yeux aveugles, est relayé par le Fils, yeux grands ouverts. La création toute entière - animaux et végétaux - encore en enfantement, attend la révélation des fils de Dieu (Rm 8). Ainsi les oiseaux - si ambigus dans les religions naturelles - et les clochettes des chevaux semblent dire : ça y est le grand Shabbat est arrivé ! Dieu revient / (Za 14,20).
Ce monde nouveau si déconcertant, semble inachevé. Comme pour les paraboles, on ne comprend pas bien : faut-il d’ailleurs prendre tout cela au sérieux ? Ainsi, les graines vont-elles jaillir dans les étoiles : la semence jetée partout, si elle mûrit, fragile, donnera trente, soixante ou cent pour un (cf. Mc 4,8). Si ce qui est semé paraît infime, dérisoire, faible, il en résulte pourtant une vie de gloire et d’éternité. Telle est l’œuvre de Dieu !
Catherine LE PELTIER,
à partir d’un commentaire de Jacques Bernard